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Insularité
  1. Espace délimité (cadré) conceptuellement et/ou sensiblement. Il définit nécessairement une rupture, un intervalle, une polarité et un seuil. Son habitation vaut comme endémique. [Le corps, l’île, la ruine, l’atome.]
  2. Vecteur plastique pouvant être à la fois ligne, surface, volume, et temps.
  3. Mode de résistance.s et/ou de conflictualité.s.

Image
  1.  Surface profonde dynamique qui maintient des objets dans un système de forces. Elle peut-être provoquée ou spontanée.
  2. Espace morphologique dont les oscillations d’intensité définissent une plasticité, plus ou moins dynamique.


Archipelité
  1. Complexe corpusculaire, dont la liaison se fait par isthme. Sa limite d’action dépend de la définition du foyer (au sens optique) et de son réseau.
  2. Ensemble conceptuel et/ou sensible.[L’atlas, l’archive, la constellation, le peuple.]





Mark

3. FOCU



Depuis le mouvement du Riacquistu des années 1970 et la structuration politique et clandestine qui l’entoure, l’avenir et l’émancipation de la Corse ont été pensés à travers la reconnaissance et l’affirmation de son passé face à une stratégie coloniale mondialisante. Bien qu'un grand chemin ait été fait, un demi-siècle après, l’énergie que portaient cette période semble s’essouffler, et finalement, la revendication politique semble aux mains de figures du passé, laissant une jeunesse en crise de sa propre voix. Aujourd’hui pourtant dans une actualité où s’éveille une pensée mondiale décoloniale et écologiste —les deux grandes revendications militantes corses—, c’est à la jeunesse de choisir les formes de sa lutte et questionner son héritage, et d’autant plus à l’heure du processus d’autonomie.


È Fora a Francia

Installation
Crédits images : Alta Frequenza, Corse-Matin, Jean-Louis Orlandetti, Kalliste HomeDesign, ...


È Fora A Francia
    Vidéo, 1:22:54, 2022



La volonté de ce projet autour de la cyclicité de la militance politique abordé par la question du feu et du récit commence par les images partagées sur Facebook des manifestations suite à  l'attaque puis la mort d'Yvan Collona à la prison d'Arles en Mars 2022. C’est la ville dans laquelle je fais mes études alors à ce moment-là, et qui pourtant reste dans le silence de cet évènement tandis que la corse s'embrase pendant un mois jusqu'à la crainte d'une confrontation armée entre militants et forces de l'ordre français. Cependant, la situation s’apaise après des accords autour de la définition d'une autonomie dite “relative”, mais la reprise de la lutte nous ramenent vers des questionnements entérrés depuis la trêve du FLNC en 2014 dans le but d’ouvrir la voie à la discussion politique apaisée. 
La lutte armée en Corse porte aujourd'hui l'imaginaire d'un passé proche de la guerre civile, notamment pour la période 1980 aux début des années 2000, et beaucoup posent la question de ses dérives. Il y a donc une conscience qui se développe face aux images qui me parviennent : l’instantanéité de l’archive. Car ces images font histoire au même moment où je les voie, elles agissent depuis une proximité éclatante et pourtant se classe déjà dans les tiroirs de l’histoire. Alors, pour qu’elle ne perde pas de cet éclat, je les reprends et je les monte chronologiquement, des vidéos en direct, celles des médias et d’autres de personnes simplement venue exprimer leur colère, puis je les montre. Attenfif au surgissement de l’image, je vois déjà le processus mémoriel s’enclencher, mais aussi la volonté de réactiver une colère contenue depuis plusieurs années. Car le but de ces images n’est pas seulement le partage d’évènements, mais bien celle d’une tension prête à l’embrasement, et l’appel au soulèvement. Et derrière cela, j’y vois les prémices d’affrontements latents.


Ekpyrosis

Installation, vidéos sonores sur télévisions cathodiques, depuis 2023Crédits images d’archives : Génération FLNC, Samuel Lajus, 2003
[Ekpyrosis]
Vidéos, triptyque, 2024
    #1 (Focu) 4:15
    #2 (Sperone) 7:57
    #3 (Nuit bleue) 3:56

︎︎︎De Renava #2, Roma Amore : La chute des Empires, Bunifaziu, 2024
© Maylis Poiget


︎︎︎ENSP Arles, 2022

Depuis Arles, face à l'actualité, je retourne sur ces images des “Années de plomb” que je regarde une nouvelle fois  les obsèques de militants du FLNC durant la guerre fratricide de 1993-1994 à la suite de la Catastrophe de Furiani le 5 mai 1992 et l'assassinat de Robert Sozzi, un incendie après une Nuit bleue, et l’affaire du Golfe de Sperone à partir d’archives qui ne paraissent pas si lointaines. Et finalement, je me demande si les évènements après la mort d'Yvan Colonna n'ont pas été instantanément archives du fait de l'importance du moment politique qui, à peine saisi par la jeunesse, a cessé, et sans même de résolution à ce jour où l'autonomie est sous discussion régressive depuis deux ans.
Je reprends alors ces deux générations d'archives : actuelles et passées, et l’objectif des manipulations que j'opère est double : amener un décalage, une brèche en éprouvant l’image, qui est elle-même mise à l’épreuve avec une ambiance lourde, chargée, et un rapport au temps complètement détracté. Tout cela dans la volonté de faire de cette installation et de ces images un espace d’intervalle où l’on peut s’insérer pour non plus voir, mais entre-voir. Le titre de ce projet lié au feu dans sa portée violente — le coup de feu — et consumatrice — : dans le christianisme la notion d’« anakephalaiaosis », la récapitulation ponctuelle du tout, est liée à la consumation par le feu : « ekpyrosis » — ce que l’on retrouve dans les symboliques du feu de Noël et de la Saint Jean, célébration du renouveau des solstices d’héritage païen. Enfin, l’ « olokaustôma » grecque, substantif de l’adjectif holokaustos signifiant littéralement « brûlé tout à fait »,  et à l’histoire sémantique  principalement chrétienne, car les Pères de l’Église s’en servirent pour traduire  la doctrine du sacrifice dans la Bible.
Cette alternance des titres entre Grec ancien et Corse questionne le régime d'intensification et illocutoire actuel de ces langues dont une est morte et l’autre en danger, et  perdant en portée communicative portant gagnent à porter des concepts encore aujourd’hui.

Furiani 1992

Installation, vidéos sonores sur télévisions cathodiques, 2023
Crédit images d’archives : 19/20 FR3 du 06 mai 1992 - Edition spéciale Furiani - Archive INA présenté par Elise Lucet les titres édition spéciale sur la catastrophe du stade de Furiani le 05 mai 1992

Furiani 1992
Vidéos, triptyque, 20:00, 2023


La Catastrophe de Furiani sera directement liée à la guerre fraticide entre les deux canals du FLNC, séparation datant du 1990, car elle mènera à l’assassinat du jeune militant Robert Sozzi, membre d’A Cuncolta et du Canale Storicu travaillant à Bastia Securità, signant le premier meurtre fratricide revendiqué par le même Canale Storicu sous couvert de « légitime défense préventive » plaidant que le jeune homme aurait été manipulé (à supposer par le canal habituel). En effet, Sozzi revendiquait l’implication des dirigeants Sporting Club de Bastia, notamment le président Jean-François Filippi, « pompe à fric » du Canale Storicu, dans le drame de Furiani et, selon des rumeurs, aurait voulu se venger des dirigeants et militants impliqués suite à la mort d’un de ses proches, et la pression du Canale Storicu auprès des victimes pour ne pas demander de dédommagements aux assurances. Cet assassinat sera considéré comme une erreur par un très grand nombre de militants mais à la tribune, le bureau d’A Cuncolta aurait applaudit la revendication, ce qui sera démenti par des personnes sur place.
Dans ce tryptique vidéo, deux temps coexistent et ce confronte : le temps périphérique des joueurs à l’échauffement et des supporters du stade, qui se répète en boucle ; et le temps central, celui de l’effondrement, dans un ralenti extrême. Dans cette confrontation, nous voyons en même temps la dissonance que l’anticipation à rebours des drames à venir. Dans cet évènement surgit une double convocation du temps, celui figé de l’instant, et celui qui avance vers un avenir historique déplorable.

Holokaustôma

Tirages celluloïd, 2024
Crédits images : Pascal Pochard-Casabianca et autres

Photographies, 4 tirage celluloïd encadré sur caisson lumineux en bois, 70 x 60 cm, 2024


︎︎︎De Renava #2, Roma Amore : La chute des Empires, Bunifaziu, 2024
© Maylis Poiget


Tout au long du projet surgit la cyclicité création-apogée-déclin-chute des luttes des structures militantes. Il s’agit ici de prendre regard nouveau porté sur notre actualité après la trêve du Front qui a permis de prendre le temps de questionner cette lutte armée, ses avancées et ses dérives, puis sa résurgence après l’assassinat d’Yvan Colonna avec le groupe GCC (Ghjuventù Corsa Clandestina). Attentif toutefois à la mythification de ce passé militant (ou a contrario, parfois, le rejet), cette installation se propose comme un espace d’interrogation. La confrontation du présent du spectateur et de la mémoire archivée, l’anachronisme de ces images médiatiques dans un espace d’art contemporain, valent comme une tentative de surgissement de l’« étincelle d’espérance » (W. Benjamin) qui se loge parfois dans les images. L’utilisation d’archives que je viens recadrer, agrandir jusqu’au pixel, permet d’opérer une réactivation directement à travers l’image du feu, associé à la fois à la révolte mais aussi à la piété. Ces images encadrés sur caissons luminieux permet de poser la question de leur brillance, au nécessaire de l’imaginaire de la révolte.

“Le colonisé n'est pas seulement un homme qui est né dans une situation coloniale, il est aussi un homme qui est né pour la révolution.” — Frantz Fanon

Anakephalaiaosis

Photographies, 2024


Bunifaziu 2024
Tirages sur plaques  de cuivres, encadrement sur caisses américaines, 15x 15 cm, 2024



Arles 2022
Tirage UV aluminium, 30 x 40cm, encadrement sur caisses américaines, 2022


Ces tirages sur plaques métalliques convoquent à la fois une histoire spectrale de la photographie, qu’un contexte politique donné. Les premières images réalisées par Daguerre étaient réalisées sur plaque de cuivre, et cette référence immédiate ramène à la pensée magique entourant les premières productions “héliographiques”, dont pourtant l’histoire retiendra les bénéfices scientifiques et mémorielles. Pourtant, ce serat ignoré la résolution à l’incarnation chrétienne que portera ce procédé, que Marie-José Mondzain liera aux différents recherches autour de l’image par les traces restantes du Christ érigées en reliques, bien qu’elles soient aujourd’hui réfutées scientifiquement.
Les premières plaques de cuivres sont issues d’images de la caserne française de Bunifaziu dont les derniers locataires furent les militaires de la Légion étrangère qui y résidèrent jusqu’en 1983, et dont les fenêtres sont criblés de balles lors de différents moments de tentions. La seconde plaque quant à elle est issue d’une image prise à Arles en Février 2022 juste avant l’assassinat d’Yvan Colonna, comme un signe annonciateur de ce travail sur le feu, mais aussi la présence spectrale d’un évènement anticipé. La lecture de ce signe photographié se fait donc sous la propriété de l’effet.


Rimondula

Vidéos, 2024
Crédits images d’archives : FOCU (parolle d’eri 06), U Focu, Petru Simone


Rimondula / 2024
4 vidéos sur télévisions, sonores 


Si nous avons regarder la symbolique de la cyclicité rituelle du feu, il existe aussi la calamité, l'incendie, contre lequel il faut lutter parfois par le feu. U Focu (le feu) peut-être aussi mis en lien avec u Debbiu ou a Rimondula, le défrichage agro-pastoral par le feu sans vent ou avec vent contraire : avant, quand il y avait le feu, on disait toujours que le berger en était responsable. Ce terrain brûlé, on l’appelait carpinetu ou usciatu et devient un espace négatif, d'attente et de silence. C'est ainsi que le projet s’ouvre vers la tradition pastorale et l’acte d’a Rimondula, des images réalisées à partir d’archives expliquant la pratique du brûlis.


[Curtina]

Photographie, 2024
Crédits images d’archives : Georges Santarelli

[Curtina]#1
Tirage jet d’encre, 18x24 cm, caisson lumineux



[Curtina]#2
Tirage jet d’encre, 70x50 cm, 2024


Retournant dans les archives de la maison de Curtina, le regard sur les pratiques de rimondula et de carbunara. Nous remarquons deux périodes de l’année différentes, mais ces évènements ont fait importance pour Georges Santarelli qui gardera ces images précieusement dans ses archives. Le nettoyage des parcelles privées est obligatoires avant l’été afin de prévenir les habitations des risques d’incendies. Cependant, cette pratique nouvelle montre l’enmaquisement progressive des zones de production autour du village (i circuli et i cunfini) qui étaient exploités jusqu’aux années 70, fin progressive d’une économie villageoise basée sur l'autoconsommation agro-pastorale de beaucoup de ses habitants, ce qui obligeait l’entretien des terrains, nécessairement démaquisés.
La pratique de la charbonnière, dont on retrouve de nombreuses bases à Curtina, permettait la production de charbon de bois par consumation avec très peu d’oxigène. On formait une structure de bois que l’on recouvrait de fougères puis de feuilles et enfin de terre avant de commencer l’allumage. La terre, travaillée en amont, était triée des feuilles et un peu humidifiée pour imperméabiliser complètement la charbonnière. Après 4 à 6 jours de combustion le charbonnier dormait à proximité afin de vérifier que le charbon ne s’enflamme pas. Il se focalisait sur la fumée, en effet une fumée bleutée  signifie que le charbon est fait. Si elle est blanche le bois ne s’est pas totalement transformé en charbon À terme la charbonnière s'affaisse. Puis on récupère les cristaux de charbon. On obtenait en moyenne une centaine de kilos de charbon pour une demi-tonne de bois. Les vestiges de charbonnière se devinent dans les forêt, ils sont reconnaissables par le muret autour d’une surface plane et abritée des vents, à la différence des aghja qui sont elles exposées au vent.

Canadairs

Vidéo, 2024
Crédits images d’archives : FOCU (parolle d’eri 06), U Focu, Petru Simone



Deux canadairs de la sécurité civile au-dessus de la ferme d’olva. Chaque année se pose la question de la répartition territoriale des 12 canadairs que possède la France. Sujets à de nombreuses pannes, malgré la récurrence annoncée de méga-feux dans les années à venir dans toute l’Europe. En Corse, deux Canadairs sont basés à Ajaccio dans le cadre du dispositif de lutte contre les feux de forêt, lequel comprend aussi un hélicoptère bombardier d'eau "lourd" basé à Corti, ainsi que des hélicoptères bombardiers d'eau plus légers. La question de leur opérativité est sans cesse mise en avant chaque année durant l’été durant lequel planne une peur des incendies de grande ampleur, d’autant plus sur une île où le nombre d’incendie criminels reste élevé. Mais cela questionne ainsi l’enjeux national derrière cette gestion du feu et du flux.  Il existe 200 Canadair dans le monde, tous venant de l'usine De Havilland, outre Atlantique. Les 12 hydravions français, la plupart construits durant les années 90, sont positionnés à Nîmes, mais durant l’été 2024, 1 est en reconfiguration en Italie. Les hydravions sont capables de larguer 6 tonnes d'eau et peuvent faire jusqu'à 20 largages par heure. Si les Canadair n'ont pas de limite d'âge, mais d'autres pays comme la France voudraient rajeunir leur flotte, mais le coût d'un appareil est estimé à 62 millions d'euros (source : France Bleu).

Análēpsis [la prise]

Photographie, 2024


Análēpsis [la prise] #2
Tirage jet d’encre, 120 x 140 cm, 2024


Análēpsis [la prise] #2
Tirage jet d’encre, 120 x 140 cm, 2024


Regardant la culture magique corse, il existe un rapport au feu de l’exorcisation qui peut nous permettre d’aller vers la guérison de la brûlure. Tout d’abord, la pratique d’u sfumu (l'enfumement) : rituel afin d’enlever l’ochju (le mauvais œil) souvent dans un cas particulièrement puissant ou d’un enfant nouveau-né, à partir de prières entonner dans l’enfumement de la personne touchée. On dit de la guérisseuse qu’elle est une sfumadora, mammina ou incantatora, ou encore tinidora pour exorciser les femmes enceintes (Roccu Multedo). Ainsi il reviendra de trouver par l'image les actes de guérison, de résolution à ce relevé de brûlures (brusgiature). Mais l’un des objets les plus puissants pour lutter contre le feu reste l’œuf ramassé le jour d’Ascension, permettant de prevenir de la tempête, de l’orage et de l’incendie. Il est encore très courant dans chaque famille de préserver les œufs du matin cueilli de ce jour.
Le mot ascension vient du substantif latin ascensio, « action de monter », qui vient lui-même du verbe ascendo, qui signifie « monter, gravir ». En grec ancien, le terme utilisé pour décrire cet événement est ἀνάληψις / análēpsis, dérivé de ἀναλαμβάνω / analambánô, « prendre en main, reprendre », il peut donc être traduit par « la prise ». Le verbe en question est utilisé vingt fois dans le Nouveau Testament et 146 fois dans l'Ancien Testament.
Mais dans les mains également, a Lesca, l’amadou, l’allume feu.
Nous prenons en main les images, la prise, nos visages, la prise, nos œufs, la prise.


Tabaâ

Photographies, formats et procédés variables
Tabaâ
Tirage jet d’encre, 30 x 50 cm, 2024

Sans titre

Photographies, tirages jet d’encre, 30 x 50 cm

Sans titre
Dyptique, tirages jet d’encre, 30 x 50 cm, 2024


Dans une main, une douille ne vaut jamais vraimenet rien. Finalement, ce projet devient et sera un lieu de questionnement de l'image à partir de la question du rituel, la manière dont les croyances et conceptions chrétiennes de l'économie trinitaire par l'incarnation relevées par Marie-José Mondzain persistent dans l'image photographique et la manière dont nous regardons l'histoire. C'est donc un lien image-histoire-rituel qui entoure ce projet à travers l'image médiatique, le feu (le foyer, le tir, la brûlure, l'incendie) et son exorcisation, une manière de regarder le passé pour tenter de saisir notre présent, dans l'arrêt du flux. Car dans la répétition se crée l'écart, inframince, premier espace de mouvance du changement à venir.

Incantesimi

Performances en collaboration avec Léna Besson et photographies
Ensemble réalisé pour la couverture du catalogue “Roma Amore”, Biennale DE RENAVA #2
500 instantanés 54 x 86 mm, prise de vue par Léna Besson, 2024


Incantesimi 
N°38/500, performances, 2024
Instantanés 54 x 86 mm par Léna Besson
© Maylis Poiget

Collection de 500 catalogues
Édition limitée avec couverture unique finie à la main
Photographies instantanées par Yan Leandri - prise de vue Léna Besson
Prière corse du feu écrite au dos de chaque photographie par l’artiste
Trilingue : Corse, Français et Anglais
296 pages
Textes : Prisca Meslier, Dumè Marcellesi, Basile Isitt, Diadora Dolfi, Léna Serru
Photographies : Léna Serru, Maylis Poiget, Félicia Sisco, Florent Biancarelli
Graphisme : Léna Serru


Parler de la chute nous amène également à questionner celle des structures immatérielles et leur survivance — leur vie post-mortem —, et ce pour faire face aux pertes de la transmission générationnelle, faire face à une jeunesse en recherche de ses repères. L’artiste reprend alors une prière (pricantula o incantesimu) de conjuration du feu trouvée durant ses recherches, qu’il applique de manière performative à plusieurs modes de guérison répartis en « tableaux » photographiés par un procédé instantané. Cependant l’artiste constate son propre manque : cette prière n’a pas respecté la transmission de la veillée de Noël apprise près du feu et a été révélée dans un livre, de fait celle-ci ne serait pas active, du moins aussi puissante car dévoilée. Il s’agit donc tout à la fois, durant cette performance, de tenter de réactiver cette prière prononcée de manière répétée jusqu’à épuisement, puis inscrite et dissimulée derrière chaque instantané, afin de questionner les processus d’intensifications et de canalisation du réel qui se base sur la relation voilement / dévoilement. Car la révélation d’une des prière derrière les 500 images ferait échouer cette tentative d’activation, qui a besoin de la dissimulation pour garder son intensité.
Cet ensemble de 500 instantanés se veut à la fois support et restitution d’un ensemble d’acte performatif de l’épreuve de plusieurs modes de conjuration du feu (à la fois l’incendie et la brûlure) mais aussi de conjurations par le feu (du charbon à la cendre jusqu’au tir). Chacun des instantanés devient un témoignage parcellaire de cette épreuve de l’artiste par — et parfois sur — son propre corps : un rituel auto-réalisé questionnant le glissement de la perception magique, le lien entre entre mage et image, et les supports de sensibilité. Ainsi, interviennent tour à tour des pratiques de guérison et de conjuration, profanes et  magiques. Pourtant, ces actes demandent un retour au fil de l’histoire : le tournant cyclique de ce projet surgit à l’interprétation de la description de R. MULTEDO de l’invocation du dernier mort comme de conjuration de l’incendie, dont l’artiste en fait référence évidente à la mort d’Yvan Colonna et des émeutes de février à mars 2022 qui furent la première manifestation d’ampleur d’une jeunesse en crise de sa propre voix, et qui alors refusé le jeu politique qui l’étouffait. Son portrait, devenu le symbole martyr d’une lutte, est montré à travers un écran, le faisant à la fois figure de feu et de cendre. Lié à cette résurgence de la violence, le feu évoque également celui des tirs qui à la fois se veulent célébration, résistance, éloignement rituel des morts et revendication armée. car dans la culture corse, le feu se veut être une porte entre les mondes par lequel nous interagissons avec les morts particulièrement durant Noël (V. LARI) avec lesquels nous échangeons le vin et le repas ; et enfin, d’illumination.



Mark